Entretien avec Albert CASTEL, Technidouanes
Propos recueillis par Ghenadie RADU, Dr en droit, Altaprisma
(formations douane, transport & logistique à l'international)
Paris, le 13 novembre 2020
Altaprisma : Merci d’avoir trouvé le temps de nous accorder cet entretien. Pourriez-vous vous présenter brièvement, s’il vous plaît ?
A. Castel : En juin 2010, j'ai créé une entreprise appelée Technidouanes pour exercer une activité de consultant en produits industriels déclarés à l'administration des douanes. Ma compétence porte notamment sur le classement tarifaire des marchandises, du chapitre 25 au chapitre 98 de la nomenclature combinée du tarif douanier commun (NC), et sur le classement des produits et technologies susceptibles de relever de la réglementation des biens à double usage (BDU), ou soumis à restrictions à l'encontre de certains pays, ou encore soumis à l'Export Administration Regulation américaine (EAR).
J'ai fait une carrière comme fonctionnaire au Ministère de l'économie et des finances, d'abord comme ingénieur et directeur de laboratoire à Paris et à Lille au sein du Service commun des laboratoires (douanes/fraudes) ; puis comme expert en produits et technologies stratégiques auprès des bureaux, de la direction générale et des services d'enquête des douanes (DNRED, SRE et SNDJ) ; et enfin comme chargé de mission dans les services du Premier Ministre (bureau des transferts de technologies de l'ex-SGDN, devenu le SGDSN).
Je n'ai jamais cessé de faire du classement tarifaire, autant depuis dix ans comme consultant indépendant, où j'ai réalisé de nombreuses expertises pour conseiller des entreprises ou pour les défendre contre l'administration des douanes, qu'auparavant en ma qualité de fonctionnaire au cours de contrôles douaniers, d'affaires contentieuses et de réunions à la Commission européenne (levée de divergences de vues entre états-membres), ainsi qu'à l'ex-COCOM (classement des BDU dans le système harmonisé).
Altaprisma : Quand il est question de classement tarifaire des marchandises, de quoi s’agit-il exactement ?
A. Castel : Le classement tarifaire des marchandises est défini par l'article 57 (alinéas 1 à 4) du Code des douanes de l'Union. L'alinéa 1 de cet article indique : « Aux fins de l'application du tarif douanier commun, on entend par classement tarifaire des marchandises la détermination d'une des sous-positions ou autres subdivisions de la nomenclature combinée dans laquelle les marchandises doivent être classées ».
La nomenclature combinée (NC), qui remplit à la fois les exigences du tarif douanier commun et des statistiques du commerce extérieur de l'Union européenne, a été publiée à l'origine en annexe I au règlement (CEE) n° 2658/87 du Conseil du 23 juillet 1987. Dans ladite annexe sont fixés les taux des droits autonomes et conventionnels du tarif douanier commun, les unités supplémentaires statistiques, ainsi que les autres éléments requis. Cette annexe I est mise à jour chaque année au moyen d'un règlement d'exécution de la Commission européenne.
L'annexe II du règlement n° 2658/87 indique les réglementations spécifiques prévues à l'article 2 de ce texte relatif au tarif intégré des Communautés européennes (TARIC). Le TARIC est établi sur la base de la nomenclature combinée par la Commission européenne. Il est constitué de sous-positions TARIC nécessaires à la désignation de marchandises faisant l'objet des mesures spécifiques applicables à l'Union européenne.
La base de données du TARIC est consultable en diverses langues sur le site internet de la Commission européenne à l'adresse :
https://ec.europa.eu/taxation_customs/dds2/taric/taric_consultation.jsp?
Chaque sous-position NC est assortie d'un code numérique composé de huit chiffres : les six premiers chiffres sont les codes affectés aux positions et sous-positions de la nomenclature du système harmonisé (SH) ; les septième et huitième chiffres identifient les sous-positions NC. Lorsqu'une sous-position SH n'est pas subdivisée pour des besoins de l'Union européenne (6 chiffres), les septième et huitième chiffres sont deux zéros. Quant aux sous-positions TARIC, elles comportent soit deux chiffres ajoutés au code NC, soit deux zéros en l'absence de subdivision de la sous-position NC.
En appuyant sur la touche « Chercher mesures », pour chaque sous-position TARIC, on obtient les renseignements suivants :
• les taux des droits de douane et les autres éléments de perception applicables ;
• les mesures applicables aux marchandises concernées (préférences tarifaires, contrôles à l'exportation, suspension de droits de douane, droits anti-dumping et droits compensateurs, certificats d'importation, etc.) ;
• les références aux textes relatifs à ces mesures.
La nomenclature combinée et le TARIC sont gérés par la Commission européenne, assistée d'un comité de la nomenclature tarifaire et statistique (ex-Comité de la nomenclature), appelé maintenant Comité du code douanier. Ce comité, composé de représentants des États membres et présidé par un représentant de la Commission, établit des notes explicatives de la commission européenne. Il est saisi soit par son président, qui est un fonctionnaire européen, soit par un État membre pour toute mise en application du tarif douanier et de l'intégration dans le TARIC de toutes les réglementations européennes du commerce extérieur. De plus, il est saisi pour résoudre les difficultés d'interprétation de la nomenclature combinée et ainsi aboutir à un accord entre pays membres en vue d'une décision de classement motivée pour une marchandise précise. Cette décision est ensuite publiée par la Commission européenne sous forme d'un règlement d'interprétation.
Le code TARIC à 10 chiffres doit figurer à la case n° 33 « Code des marchandises » du document administratif unique (DAU) de la déclaration en douane. C'est donc ce que l'on appelle le « classement tarifaire ».
Altaprisma : Pourquoi les entreprises œuvrant à l’international doivent bien maîtriser le classement tarifaire ?
A. Castel : Généralement, les entreprises confient leurs déclarations en douane à des transitaires, c'est à dire aux sociétés de transport qui acheminent leurs marchandises vers la France ; ou qui envoient leurs produits à l'étranger, hors Union européenne. Ces prestataires de service sont en principe compétents pour les formalités douanières mais peuvent, de bonne foi, commettre des erreurs dans les classements tarifaires à l'importation ou à l'exportation par méconnaissance de la nature exacte et des caractéristiques techniques des marchandises à déclarer. Certaines grandes entreprises déclarent elles-mêmes leurs marchandises, mais peuvent également commettre des erreurs de classement pour les mêmes raisons du fait du cloisonnement entre leur service douane et leurs unités de production ; ou, dans le cas de grands groupes industriels, du fait de l'éloignement entre le service douane du siège et les filiales étrangères.
À l'importation, l'erreur de classement tarifaire peut être très grave. Il s'agit d'une infraction qualifiée de « fausse déclaration d'espèce », qui peut être sanctionnée en application de l'article 412 du code des douanes par la confiscation des marchandises litigieuses et d'une amende de 150 euros à 1 500 euros ; et qui peut, en plus, conduire au rappel des droits de douane impayés au cours des trois années précédant la notification d'infraction. Cela peut arriver à tout moment : soit dans les quatre mois suivant la date de déclaration par un contrôle du bureau de douane, soit jusqu'à cinq ans par un contrôle d'un service régional d'enquête (SRE) ou de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED). L'administration des douanes dispose pour cela d'experts scientifiques du service commun des laboratoires de la DGDDI et de la DGCCRF (SCL). Les directeurs des laboratoires régionaux du SCL sont compétents pour émettre des avis sur les classements tarifaires après analyses physico-chimiques sur des échantillons de marchandises déclarées ; ou, a posteriori, après expertises sur documents.
De plus, quand la marchandise est déclarée par erreur dans une sous-position de la nomenclature combinée où les biens concernés sont plus taxés qu'à la sous-position correcte, cela peut avoir des conséquences sur le prix de revient des marchandises fabriquées à partir des produits ou des matériels importés. L'entreprise concernée peut toutefois, dans ce cas, déposer une demande de remboursement, mais la procédure prévue dans la réglementation européenne nécessite une justification technique et juridique (d'après les règles générales, les notes de chapitres, les notes explicatives, etc.), non seulement pour obtenir une suite favorable, mais aussi pour recevoir la réponse dans un délai convenable.
A l'exportation, l'erreur de classement tarifaire paraît sans grande importance pour le transitaire, en raison d'un risque infime de contrôles douaniers susceptibles de n'aboutir qu'à des amendes de principe, mais l'exportateur doit savoir que le client étranger déclare généralement la marchandise dans le tarif douanier de son pays d'après la sous-position du système harmonisé (6 chiffres) fondée d'après la sous-position NC déclarée par son fournisseur (8 chiffres). En fait, cela peut conduire le client à devoir payer des droits de douane : soit plus élevés que ceux de la sous-position correcte de la nomenclature du pays où la marchandise est exportée ; soit en revanche plus faibles, ce qui peut présenter pour le client un risque de contentieux avec les autorités douanières de son pays.
La base de données TARIC signale en divers renvois les multiples réglementations du commerce extérieur. Par exemple, en ce qui concerne une marchandise soumise à la réglementation des biens à double usage, son classement tarifaire dans une sous-position TARIC exempte de « renvoi DU », sans présentation d'une licence d'exportation, est susceptible de constituer un délit qualifié de « fausse déclaration d'espèce de nature à éluder une mesure de prohibition », ce qui est passible de 5 ans de prison, de lourdes d'amendes et de confiscations en application des articles 38 et 414-2 du code des douanes.
Altaprisma : En pratique, comment bien déterminer le classement tarifaire d’une marchandise ? Quels seraient les principes et les règles applicables dans ce domaine ?
A. Castel : Avant tout, il importe de chercher à bien connaître la marchandise en question : non seulement d'après des fiches techniques indiquant ses caractéristiques et d'après des fiches commerciales indiquant son usage ; mais aussi d'après des renseignements recueillis sur son procédé de fabrication et sur ses avantages technologiques en consultant des bases de données de publications scientifiques et de brevets industriels. L'assistance d'un ingénieur, qu'il soit employé dans l'entreprise ou consultant extérieur, est souhaitable pour obtenir une parfaite description du produit ou du matériel en question avant toute réflexion sur son classement tarifaire.
Pour commencer, il faut relire attentivement et appliquer dans le bon ordre les six règles générales (RG) d'interprétation de la nomenclature combinée qui, en résumé, indiquent :
RG1 : que les termes de positions (4 chiffres), les notes de sections et les notes de chapitres et de sous-positions ont une portée déterminante ;
RG2 : que celle-ci concerne :
(a) les articles incomplets ou non finis ; ou
(b) les matières à l'état pur ou mélangé ou associé à d'autres matières et les ouvrages constitués de ces matières ;
RG3 : que les produits mélangés ou les articles composites doivent être obligatoirement être classés :
(a) en fonction de la priorité de la position la plus spécifique par rapport à la position la plus générale, et de la spécificité de la position suivant la composition d'un produit mélangé ou d'un article ou d'un article composite ; et
(b) d'après la matière ou l'article qui lui confère le caractère essentiel ; et
(c) sinon, d'après la position la plus éloignée par ordre de numérotation ;
RG4 : sinon, que le classement peut s'opérer d'après le classement dans la position afférente aux articles les plus analogues ;
RG5 : comment classer :
(a) les étuis et contenants ;
(b) les emballages ;
RG6 : que le classement dans les sous-positions d'une même position doit suivre les règles générales RG1 à RG5 citées ci-dessus.
Le travail de classement consiste alors à trouver une position NC pouvant convenir à la marchandise en question conformément aux dispositions constituant les règles générales RG1 à RG5 (termes de positions, notes de section, notes de chapitres, notes de sous-positions, conférant le caractère essentiel d'une préparation ou d'un article composite, etc.). Il faut ensuite choisir la sous-position NC suivant les mêmes dispositions en application de la RG6.
Cela doit être complété :
1° - par la lecture des notes explicatives du SH constituées des considérations générales, des exclusions de positions et des notes explicatives de sous-positions ;
2° - par la consultation des notes explicatives de la nomenclature combinée, s'il en existe pour les chapitres envisagés pour le classement ;
3° - par la recherche de décisions éventuelles de classement de la Commission européenne et d'arrêts possibles de la Cour de Justice de l'Union européenne, et ;
4° - par la consultation de la base de données TARIC.
La recherche d'un classement d'une marchandise équivalente dans la base de données européenne des renseignements tarifaires contraignants (RTC) peut être utile, notamment pour un classement par analogie d'après la règle générale RG4. Mais Il faut savoir qu'un RTC n'est valable que pour une marchandise bien précise et qu'il ne faut pas se référer exclusivement à la règle générale RG4, du fait qu'il est toujours possible de se référer aux cinq autres règles générales.
Le classement tarifaire est donc le code TARIC à insérer dans la case 33 du document administratif unique servant à la déclaration en douane, intitulée « code de la marchandise ».
Altaprisma : Comment choisir la bonne position tarifaire lorsque le même produit prétend à être classé dans l’une des deux positions tarifaires concurrentes ? Pourriez-vous nous donner quelques exemples ?
A. Castel : Si les règles citées ci-dessus ont été attentivement examinées et si la fonction de la marchandise est bien comprise, il n'existe qu'une seule position tarifaire possible pour la marchandise en question. Voici en effet des exemples de classements pour deux types de produits chimiques et deux types d'appareils électroniques :
1° Le lauryl-éthoxysulfate de sodium, utilisé dans la composition des shampooings, abaissant fortement la tension de surface de l'eau en raison de son excellent pouvoir moussant.
Ce produit relève de la sous-position TARIC n° 3402 11 00 00 des agents de surface anioniques puisque :
- la note 3 du chapitre 34 indique « au sens du n° 3402, les agents de surface organiques sont des produits qui, lorsqu'ils sont mélangés avec de l'eau à une concentration de 0,5 % à 20 degrés Celsius et laissés au repos pendant une heure à la même température: a) donnent un liquide transparent ou translucide ou une émulsion stable sans séparation de la matière insoluble et b) réduisent la tension superficielle de l'eau à 4,5 × 10 –2 N/m (45 dynes/cm) ou moins » ;
- la position SH n° 34 02 comporte dans son intitulé les termes « agents de surface » ;
- en solution aqueuse, ce produit se dissocie en un anion lauryl-ethoxysulfate (responsable de l'activité de surface) et en un cation sodium ;
- les notes explicatives de la position SH n° 34 02 indiquent que « les agents de surface organiques peuvent être : 1) anioniques - ils s’ionisent en solution aqueuse, pour fournir des ions organiques chargés négativement et responsables de l’activité de surface, etc. 2) cationiques ... 3) non-ioniques.... 4) ampholytes...» ; et
- la sous-position SH n° 3402 11 contient les termes «- agents de surface organiques - anioniques».
2° Le gel hydroalcoolique, dénommé « solution hydro-alcoolique recommandée par l'Organisation mondiale de la santé pour l'antisepsie des mains », conditionné en flacon de 100 ml pour la vente au détail, et constitué de 88,9 % d'éthanol (à 90 %), de 4,2 % de peroxyde d'hydrogène (à 3 %), de 1,5 % de glycérol et de 5,4 % d'eau.
Ce désinfectant, qui détruit les virus et bactéries, est différent d'un médicament prophylactique qui empêche le développement des maladies (tel qu'un vaccin, un antibiotique à usage préventif, un produit anti thrombo-embolique veineux, etc.).
Cette préparation relève de la sous-position TARIC n° 3808 94 00 00 des désinfectants puisque :
- l'intitulé de la position n° 38 08 comporte les termes « préparations désinfectantes » ;
- les notes explicatives de la position n° 38 08 indiquent « les désinfectants sont des agents qui détruisent d'une manière irréversible les bactéries, virus ou autres micro-organismes indésirables se trouvant généralement sur les objets inanimés, etc.» ;
- le glycérol n'agit que comme humectant et l'eau oxygénée comme fongicide léger ; et
- vu les règles générales d'interprétation de la nomenclature combinée 3(a) et 3(b) et 6, la sous-position 3808 94 intitulée « désinfectants » est plus spécifique que la sous-position n° 3808 92 intitulée « fongicides », car l'alcool agit en tant que bactéricide et virucide et confère ainsi le caractère essentiel à cette préparation.
3° La plate-forme de centralisation des informations collectées par plusieurs passerelles reliées à différents réseaux informatiques de milliers d'utilisateurs, assurant notamment les fonctions de routage (au travers d'internet) et de pare-feu.
Ce n'est pas un analyseur de réseau, car il ne détermine pas les caractéristiques techniques d'un réseau, mais ne fait que recevoir les informations sur leurs utilisations que les passerelles gèrent au niveau local. Cela permet au siège d'un groupe industriel ou commercial d'avoir connaissance des menaces et des attaques portant sur ses réseaux informatiques.
Cet appareil électronique, conçu pour la collecte des « logs » informatiques, relève de la sous-position TARIC n° 8517 62 00 00 comme « appareil de réception de données » puisque cette fonction est citée à la fois dans l'intitulé de la position SH n° 85 17 et dans celui de la sous-position SH n° 8517 62.
4° L'appareil de test de résilience destiné à vérifier la réactivité des réseaux informatiques connectés à internet, aux risques de microcoupures ou de coupures (pannes) ; c'est-à-dire face aux perturbations accidentelles et malveillantes des signaux binaires discontinus (paquets) qui circulent dans ce réseau informatique mondial qu'est Internet.
Lorsque les paquets sont véhiculés dans des fils de cuivre, des fibres optiques ou des ondes hertziennes, les signaux sont préalablement modulés et multiplexés dans les trois cas sous forme électrique pour obtenir des télécommunications à hauts ou très hauts débits. Ils sont affaiblis en fonction des longueurs de chemins parcourues et de leurs passages dans des nœuds, et font nécessairement l'objet de réparations et de réémissions automatiques par les éléments du réseau à tester.
Les tests de résilience de cet appareil permettent d'étudier la fiabilité de ce réseau, en lui envoyant des paquets contenant des signatures binaires erronées, ce qui conduit à leurs corrections par les passerelles et les routeurs connectés au serveur et par les logiciels antivirus de ses utilisateurs.
Suivant la qualité de service de ce réseau, cet appareil de test constate alors :
- soit simplement un léger retard très peu inquiétant dans la réponse du signal, du fait de la réparation instantanée des micro-ruptures par une reconstitution des paquets, ou une réémission, ou encore une déviation de leurs chemins normaux ;
- soit un retard assez anormal s'il existe un dysfonctionnement quelconque dans l'un des éléments du réseau ;
- soit une panne informatique consécutive à de multiples dysfonctionnements entraînant une très mauvaise résilience, qui peut être très grave s'il s'agit d'un réseau bancaire, d'un site de vente par correspondance, d'un opérateur de téléphones portables, etc.
Cet appareil électronique teste donc des signaux hauts débits, ou très hauts débits, modulés par DMT (Discrete Multi Tone) en centaines de bandes de fréquences (appelées « tonalités ») transmettant chacune en des temps très brefs des millions de paquets contenant chacun une très petite partie du signal modulé par QAM (Quadrature Amplitude Modulation) en amplitudes et en décalages de phase.
Suivant les différents modes de transmission (éthernet, Wi-Fi, ADSL, etc.), cette modulation numérique concerne 4 bits (16-QAM), 5 bits (32-QAM), 6 bits (64-QAM) et jusqu'à 15 bits (32568-QAM), correspondant respectivement à 16, 32, 64 et jusqu'à 32568 états d'amplitude et de phase (pour les très hauts débits).
La qualité de service d'un réseau informatique connecté à Internet dépend des états QAM des signaux reçus en retour par cet appareil de test à la suite d'envois d'un petit nombre de paquets numériques erronés. Les états de ces signaux correspondent à de multiples niveaux d'amplitude couplés à de multiples décalages de phase pour un seul paquet et sont donc des grandeurs électriques variables contrôlées automatiquement par ce testeur de résilience.
Cet appareil relève donc de la sous-position TARIC n° 9030 40 00 00 en tant qu'appareil spécialement conçu pour les techniques de la télécommunication, puisque la position SH n° 90 30 concerne notamment les « appareils pour la mesure ou le contrôle de grandeurs électriques » ; et la sous-position SH n° 9030 40 vise les « appareils spécialement conçus pour les techniques de la télécommunication ».
Altaprisma : Qu’en est-il de l’application sur le terrain du dispositif de « Renseignement tarifaire contraignant » (RTC) ? Quels seraient les avantages et les inconvénients du dispositif en question ?
A. Castel : Le RTC présente l'avantage de la gratuité et de la sécurité juridique d'un classement tarifaire. Mais, bien souvent, les demandes de RTC sont laconiques et n'indiquent pas bien les caractéristiques ni la fonction des marchandises en question, obligeant la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) à demander au service commun des laboratoires une analyse physico-chimique sur l'échantillon ou, en l'absence d'échantillon, l'expertise technique sur les documents présentés. Cela retarde considérablement la décision de la DGDDI. Cette réponse décrit la marchandise en très peu de mots et indique un classement dans la nomenclature combinée (8 chiffres). En cas de désaccord sur la sous-position NC retenue, le recours gracieux (puis éventuellement contentieux) est possible dans les délais voulus, mais comme la DGDDI n'indique aucune motivation en référence aux caractéristiques de la marchandise, ni aux règles générales d'interprétation de la nomenclature combinée, ni aux notes explicatives (SH et NC), ni à d'autres textes douaniers, il est difficile de contester le classement imposé sans savoir les raisons pour lesquelles le classement a été choisi.
Il serait alors recommandé de faire réaliser une expertise par un ingénieur (employé de l'entreprise ou consultant extérieur), à présenter avec la demande de RTC, aussi développée que les quatre classements motivés que j'ai donnés en exemples sur le choix de la bonne position tarifaire. Cette façon de procéder permettrait à la DGDDI de mieux comprendre le produit à classer selon la NC et de communiquer sa décision à l’entreprise concernée dans un délai raisonnable.
Le mot de la fin
A. Castel : Le classement tarifaire des marchandises n’est pas à prendre à la légère, car les conséquences pour les entreprises peuvent être désastreuses (sanctions, amendes, etc.).
Les quatre exemples assez complexes que j'ai donnés ci-dessus montrent qu'il est important de bien décrire la marchandise en question, notamment sa fonction, pour pouvoir ensuite justifier son classement tarifaire.
Bien qu’il soit possible de demander un RTC, rien n’empêche de solliciter l'assistance d'un consultant indépendant qui développe dans un rapport d'expertise non seulement la partie technique, mais aussi la partie juridique en référence aux règles douanières que j'ai indiquées ci-dessus.
De cette façon, on ne trouvera jamais deux positions tarifaires pour une seule marchandise.
Altaprisma : Nous vous remercions pour vos éclairages.
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